SWIM + BIKE + RUN = TRIATHLON

Pour atteindre un objectif, soit on se donne les moyens, soit on se trouve des excuses.

dimanche 30 juillet 2023

PAS DE JUS A VITORIA !


L’IronMan de Vitoria Gasteiz est passé. Voilà déjà deux semaines. Et étrangement, l’envie de partager le ressenti de ma course est moins fort que d’habitude. 

J’ai vécu ce triathlon différemment des courses précédentes. Il fut comme l’aboutissement d’une période curative, et non d'une course à la performance, même si le SUB10 trotte toujours quelque part dans un coin de ma tête quand j’aborde l’épreuve reine.

Courir un IronMan est normalement la cerise sur le gâteau. Le chemin qui conduit à sa réussite s'avère souvent plus difficile que la course elle-même. C'est un investissement dans le temps et une régularité infaillible. Toute blessure, maladie, chute, fatigue, démotivation peut enrailler les mécanismes mis en place.

Et justement, le chemin, qui m’a mené jusqu’à ce dimanche 16 juillet 2023, a vraiment été parsemé d’embûches, ou plutôt de blessures à répétitions. 

  • Y aurais-je laissé des plumes et beaucoup d’énergies à soigner des tendinites qui m’ont empêché de courir pendant la plus grosse partie de la préparation ? 
  • Suis-je resté davantage focalisé sur les « à côtés médicaux » plutôt que sur la qualité de l’entrainement ?
  • Fallait-il jeter l’éponge et repousser à l’année prochaine ? Je ne crois pas. Car plus tôt on est remis, mieux c’est ! 

Mais le chemin qui m’a mené à ce nouvel IronMan fut vraiment particulier.

C’est en effet la toute première fois que je ne suivais pas le programme spécifique d’une quinzaine de semaines qui me mène souvent à un pic de forme le jour J. 

Toutes les séances ont été faites un peu à l’envie, au feeling, jonglant évidemment avec la disponibilité de la machine ou plutôt cette incapacité de pouvoir courir sereinement. C'est vraiment revenu au tout début du mois de juin, un mois et demi seulement avant l’échéance.


La préparation a donc gravité autour de « je dois pouvoir courir sans avoir mal »

Alors certes, j’ai pu nager correctement puisque je m’étais même inscrit au club des Dauphins Palois pour parfaire ma glisse. J’ai aussi pas mal roulé, même si les sorties longues furent moins nombreuses que les années précédentes. Et pour « pouvoir courir sans mal », la période d'attente, de reprise, d'arrêt, de re-reprise, de re-arrêt fut longue, très longue, trop longue...

  • Séances chez le kiné de janvier à mars/avril-mai pour rééquilibrer les tensions et surtout travailler les étirements. La raideur des parties postérieures des cuisses étant mon point le plus faible.
  • Alors que je reprenais la course, une tendinite sous le fessier, haut de l’ischio, que l’on repère facilement grâce au test du paillasson, a stoppé net mon élan dans la reprise pédestre. Au bout de 1 à 2 km de course, une douleur persistance sous la fesse arrêtait mes velléités.
  • Des mollets durs (malgré des étirements) qui ont trop souvent « pété » au bout de 20mn de course et à trois reprises, entre mars et début mai. Verdict du docteur du sport, des fibroses. En fait, quand le muscle lâche, il casse et engendre une faiblesse au niveau de la rupture. S’il se reconsolide sans soin, la fois suivante, la rupture se fait à la limite de cette consolidation. En gros, cela peut être sans fin si ce n’est pas soigné correctement. Et comme je cumulais blessure sur blessure aux mollets, fibroses à volonté. Traitement : ondes de chocs sur les fibroses.
  • Voilà donc que pendant quelques semaines je fus contraint de guérir péniblement de la tendinite sous la fesse et de « casser » les fibroses aux mollets avec un appareil de torture, complété par des exercices de renfort musculaires pour les mollets.
  • Et pour la reprise de la CAP, fin avril, j’alternais une minute de marche et une minute de course en augmentant petit à petit la durée de course de manière progressive.
  • Etirements tous les soirs aussi,
  • Massages des mollets pour assouplir la viande…
  • A cela s’ajoute un léger surpoids, l’âge n’aidant pas à perdre facilement.


Bref, vous l’avez compris, le chemin de croix fut un peu long avant de pouvoir enfin courir, fin mai : mon premier 5km non-stop sans douleur et un 2.5km de CAP au Triathlon de Mimizan sur le XS ! 

Autant dire, qu’heureusement que le vélo fut là pour faire le foncier. Même musculairement, en CAP j’ai encaissé difficilement l’allongement des distances. Les quadriceps furent très douloureux dès que j’approchais l’heure de course dans la seconde quinzaine de juin et il ne restait plus qu’un mois avant d’affronter le marathon de l’IronMan. Autant dire que le temps manquerait. Distance maximale effectuée pendant cette préparation : 19km à 11 km/h. Pas de quoi être faire le fanfaron !

Alors, tous ces aléas et ces blessures musculaires, que l’on rencontre en prenant de l’âge, font partie du jeu. Mais quel jeu ! Beaucoup jetterait l’éponge. Mais la passion l’emporte. 

La tête prit souvent le lead : en gros, quand on veut, on peut ! 

Mais quelle débauche d’énergie… D’ailleurs, j’étonnais Loulou quelques jours avant la course. Je lui racontais que j’étais bien plus fatigué que d’habitude et que l’objectif était de dormir un maximum pour reprendre des forces ! Un signal faible ?

Alors, en cette veille de course, la nuit du samedi au dimanche, bien connue pour un sommeil très léger, mon corps était-il à 100% de ses capacités de recharge ? N’avait-il pas tout donné mentalement, psychologiquement et physiquement pour se soigner ? 

Avec en arrière-plan, cette pression supplémentaire et inutile du "graal SUB10" qui planait… Peut-être ? 

Je ne saurai jamais et je ne cherche ici point d’excuses… J'essaie de comprendre et peut-être expliquer rationnellement pourquoi le jour J, je n’ai pas été au rendez-vous de la performance. 

"Pas de jus à Vitoria !"

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L’arrivée en Espagne se fait le vendredi 14 juillet. Le numéro de dossard est attribué en fonction de l’ordre de présentation lors du retrait. Ce sera le 844. Il plaira à tout le monde ce BIB. Tant mieux ! Cela débute bien. 

On ne traine pas en ville, juste le temps d'une photo proche de la Finish Line.

L’idée est de faire la reconnaissance vélo de la montée du barrage (environ 10-15km) puis de rejoindre le camp de base et faire du jus. Je note néanmoins sur le vélo qu’il y a pas mal de vent chaud. 

La nuit sera moyenne, le matelas est un peu dur et donc petit mal de dos au réveil et pas beaucoup dormi.

Samedi matin, veille de course, c'est le moment de la séance déblocage vélo de 30mn. 

Mais un premier incident arrive. Je pose le vélo sur le grillage en face du portail de notre logement et soudain un molosse surgit, met ses deux pattes sur le grillage en aboyant et le vélo se retrouve à terre. "Quel con de chien !" Le porte-bidons double, d’arrière de selle, se casse dans la chute. Quelle poisse ! On file rapidement à Decathlon à 15mn en voiture pour voir si on ne peut pas le remplacer. Il n’y en a pas. On finira par acheter une colle super forte au Carrefour pour réparer le système. Cela sèchera pendant toute la journée et ça a l’air de tenir bon.

L’après-midi, nous partons pour le centre de Vitoria Gasteiz pour déposer le sac de transition CAP. On s’arrête au passage sur le stand Otso (Adrien est fan) pour faire quelques achats. Ensuite, vers 17h30 on dépose le vélo dans le parc près du lac. 

J'abrite la monture pour la nuit avec des plastiques sur le poste de pilotage et sur la selle. On croise Florent, une connaissance grâce à nos jeunes qui sont souvent sur les mêmes courses, qui se lance sur son premier IronMan et sa famille… puis on rentre au logement. 

Comme évoqué quelques lignes au dessus, la nuit sera courte, évidemment, on dort peu généralement, mais heureusement, j’opte pour un autre lit au matelas plus accueillant dans une chambre laissée vacante.

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Dimanche matin, 5h15. Tout le monde debout ! C'est le jour J.

Je déguste quelques portions de gâteau sport maison. Les affaires et les bidons ont été préparés la veille. La famille BipBip est parfaite dans le timing. 6h pile, on quitte la casa. Direction le lac, ou plutôt, un emplacement à 1km du lac, car les routes seront bloquées pour la course donc l’accès ne sera pas possible. On se gare dans le petit village repéré la veille. 

Et nous voilà partis tous ensemble, à pied, au milieu de la route, à chanter la chanson de Baloo 

« Il en faut peu pour être heureux, vraiment très peu pour être heureux, il faut se satisfaire du nécessaire… »

On arrive à l’aire de transition T1. Je m'apprête à installer le vélo tranquillement. 

Et comme d’habitude (je ne comprends pas pourquoi les organisateurs passent à côté à chaque fois) la barre où l’on accroche le vélo par la selle est trop basse, surtout quand on a les deux bidons de ravitaillement derrière. Les habitués et spécialistes comprendront. Je mets les bidons et teste la sortie du rack. 

Et là double effet kisscool ! 

La colle ne tient pas et le dispositif se casse. La poisse ! "Quel con de chien !" Je n’aurai plus de bidon si je ne trouve pas une solution. Je décide de défaire un porte-bidon et de le mettre sur le cadre, mais pour cela, il me faut des clés de pan. Direction le stand mécanique tenu par deux français super sympas. Il me prête les clés. Le bidon est installé.

Je retourne à ma place pour finir la préparation du vélo. Heureusement qu’on est arrivé en avance, donc j’ai eu le temps, malgré le contre-temps. Tout est prêt. Il n’y a plus qu’à attendre le départ, qui est dans 30mn. 

Je rejoins ma petite famille.

Il est maintenant l’heure d’enfiler la combinaison néoprène, de prendre une photo avec les enfants et de se diriger vers le SAS de départ. 

Je choisis le sas des 60mn. Je partirai donc dans les premiers.


Comme toujours, les dernières minutes sont prenantes. Le speaker chauffe le public et les athlètes. On lève les bras, on claque des mains sous la musique à donf ! On sera IronMan en fin de journée… c’est le but de chacun d’entre nous.

Je reste concentré autant que faire se peut.

Le décompte se fait en commun pour lancer les 6 premiers athlètes…. C’est parti !

Je suis dans ma file et toutes les 6 secondes, 6 concurrents sont lâchés et font bipper leur puce sur le tapis de départ… ça avance assez vite en fait. Il ne reste plus que 4 gars devant moi. Bip Bip Bip Bip Bip Biiiiiiiiiiiiip ! Encore une salve de 6 triathlètes qui court vers le lac. Puis c’est bientôt mon tour ! Je respire profondément.

Je repense à une phrase à cet instant : 

« Tu sais ce que tu as à faire ! Alors fais-le ! »

Il est 8h33 et 6s quand la puce bippe et annonce officiellement mon départ. 

Let’s go ! On y est ! En route pour la finish line.


LA COURSE


NATATION – 3.8km, une boucle : longue.


Je cours sur le tapis qui mène au lac et plonge. Il y a beaucoup d’algues sur le début. On les touche du bout des doigts. C’est parti pour une très longue ligne droite de 1 600 mètres. Et elle est longue cette ligne droite. Je nage assez souple. J’essaie d’allonger au max et comme je suis décalé à droite par rapport au flot des nageurs, je suis finalement assez tranquille pour poser la nage. 

Au bout de quelques minutes, je prends conscience que je ne me sens pas comme d’habitude. Les sensations sont moyennes, le souffle est ok, mais les bras sont lourds à lever, pas d'énergie, pas trop d'appui… J’arrive bien à choper des pieds pour me mettre derrière des nageurs plus rapides, profiter de l’aspiration et me relancer, mais, bizarrement, contrairement à d’habitude, je me fais vite décrocher. Je n'arrive pas suivre…

Et que cette ligne droite est longue ! La montre a déjà bipé trois fois (1500m donc) et j’arrive presque à la bouée du bout.

Contournement pour obliquer à 90°, mais les bouées qui suivent sont difficiles à repérer. Soleil en face. Et surtout pas assez nombreuses. Je suis alors la masse des nageurs devant moi, je leurs fais confiance, dont une féminine qui nage assez droit. Certains ont d'ailleurs des trajectoires hallucinantes, parfois je me demande comment ils font pour faire de tels écarts.

Adrien m’avait dit : 

« Tu passes la première bouée et après à fond avec les bras ! »

J’y pense. Je me sens accélérer et c'est pas mal du tout… Mais ça ne dure pas. Je n’arrive pas à maintenir ni la fréquence, ni la force de l’appui dans l’eau. 

Je nage comme un caillou ! Un caillou qui ne ricoche pas.

La seconde bouée du rectangle arrive. Contournement. Et on repique vers la sortie à 90°. Là pareil, au début, je cherche les bouées que je ne vois pas tout de suite. Ils ont économisé sur les bouées ou quoi ? Les sensations sont identiques. Pas ouf !

La dernière portion me semble d’ailleurs bien longue… Et comme toutes les bonnes choses ont une fin, j’arrive à la dernière bouée à prendre à droite, puis dans 100m, la Natation, la première épreuve de l'IronMan, celle où j’avais pleinement confiance en mes moyens, se terminera. Yessss.

Je m’extirpe de l’eau sous les encouragements. J’ai un peu de mal à trouver la ficelle pour retirer la combinaison néoprène. J’y parviens enfin. En courant sur le tapis qui mène au parc à vélos, je regarde très vite la montre et je ne sais pas si je vois 1h03 ou 1h08. Eh oui, 50 balais passés, la vue baisse, le 3 et le 8, c'est presque pareil… mais aux vues des sensations, j’opte pour la seconde marque, que Dimitri confirmera au départ du vélo.

C’est ça, j’ai donc bien nagé comme un caillou.


Transition 1

Hop hop hop ! Je finis la course sur le tapis et j’arrive à mon sac. Je sors les affaires. La combinaison est assez vite retirée et je suis raisonnablement bien organisé. Je remets le sac sur le rack avec les équipements de natation à l’intérieur. Cette transition est correcte. J’entends Dimitri m’encourager. Je fais rapidement un signe en levant la main. T1 en moins de 4mn avec tout le parc à traverser avec le vélo à la main. Ça me va.

VELO – 180km, trois boucles : du vent perturbant


Je monte sur le vélo. Dimitri me confirme les 1h08 de NAT et me dit que je suis à 1h12 de course. C’est parti pour mon point fort, le VELO. Ca va chauffer les gars ! "Ca sent la poudre" comme dirait Xav'

Je repense à la dernière fois où j’ai effectué ce parcours, l’année où il y avait eu le brouillard et qu’on avait fini par un BIKE + RUN. J’étais parti bien trop vite, bouclant les 25 premiers km à 42km/h de moyenne. Alors, cette fois, la prudence ou plutôt le contrôle est indispensable. Ne pas s’enflammer, gérer les 18 premiers kilomètres légèrement en montée, puis lâcher les watts après… et surtout ne pas oublier que je n’ai plus qu’un seul bidon, donc bien penser à ne pas rater les ravitaillements de l’organisation.

Je me tiens à ma ligne de conduite. Je me cale à 34-35 km/h, pas plus vite. Gestion.

Les premiers kilomètres sont faits sur le bon tempo. Sauf que… dès qu’une petite bosse se présente, je n’ai pas des super sensations. Jambes un peu lourdes. Mais je ne m’inquiète pas plus que ça… 

Les 18 premiers kilomètres passés, il est maintenant temps d’appuyer pour faire monter la moyenne progressivement. J’y parviens. Je monte jusqu’à 36.6 km/h et je suis satisfait si je peux rester dans cette plage 36.4-37 de moyenne. Je devrais passer sous les 5h. Je double des athlètes, des athlètes qui n'ont pas nagé en mode 'caillou'.

C’est très motivant. Mais vers le KM50, je commence à avoir de l’inconfort gastrique sur le bas du ventre et les jambes ne répondent pas comme je voudrais. Je ne suis pas super bien ou plutôt je n’ai pas d’énergie. Je fais le maximum pour ne pas trop faire chuter la moyenne.

J’avais passé les 72km du premier tour en 1h54 la dernière fois, l’idée est de faire environ 1h58 et d'accélérer progressivement…

KM60. Quelques kilomètres avant de passer la portion du barrage que j'ai reconnue il y a deux jours. On a obliqué vers le Nord Est. Et là, je comprends tout d’un coup que ça va être compliqué pour la moyenne. Le vent souffle. Et pas qu’un peu. De face. 

Je m’alimente bien, je bois, mais je sens que je laisse de l’énergie pour lutter contre le vent. La portion barrage est très bien passée, tranquille, zen zen.

Dans 6/7km, je devrais revoir mes supporters. J’ai d’ailleurs une grosse envie de pisser… Et je calcule que si je m’arrête pour me soulager au niveau de ma petite famille, j’en profiterai en même temps pour récupérer mon second bidon qui aurait dû faire partie du voyage depuis le début. 

Et là je m’entends dire : « Quel con de chien ! »

Virage. Grande ligne droite avec petites bosses. Ils sont là. 

Je vois la famille BipBip sur le bord de la route qui m’encourage. 

Dimitri me crie que je suis 22ème de mon GA. 

« Allez Papa, remontada ! »

Mais je m’arrête. 

Les enfants sont super étonnés et Mme BipBip qui est en train de filmer encore davantage. Je me soulage et on m’apporte mon second bidon. Je leur confie que je ne suis pas super bien. Pas de jambes. Et comme me lance Adrien 

« Ne t’inquiète pas, ça peut revenir. » 

J’aimerais bien et j’espère qu’il aura raison.

Je repars pour la seconde boucle. Je passe finalement en 2h02. J’ai à cet instant 4mn de retard. 4mn ce n'est rien me diriez-vous, cela représente quand même presque 3km à 36 km/h. Eh ouais...

On retrouve la partie des 18 kilomètres en légère montée, orientée Est Nord-Est, et comme par hasard le vent est plus fort et de trois-quarts face. La moyenne risque de prendre encore un coup. 

Je m’alimente autant que je peux, je prends des bidons d’eau à chaque ravito de l’organisation, je mange des morceaux de bananes aussi (et ça me fait du bien) mais rien de bien transcendant se passe.

Yapa les jambes !

Et ce foutu vent chaud qui ne faiblit pas, au contraire…

Sur la partie retour, donc cette fois, vent dans le dos et plus en descente, je me remets à bien rouler. Mais honnêtement pas aussi vite que je suis capable de le faire d’habitude. Ça me gonfle de ne pas pouvoir dégager plus de Watts, un peu comme si le moteur était bridé pour donner une image plus explicite. 

Alors, je pose pour la photo.

Bon ! La moyenne remonte vers 35 km/h, ce n’est pas si mal, mais pas dans mes objectifs.

En passant devant l’Arena de basket près de Vitoria, j’entame mon ultime boucle. La prochaine fois que je passe ici, je partirai à gauche vers le centre-ville. 

Les miens sont là pour me crier dessus… 

Il reste en gros 50km. Virage à 90° plein nord. Poum ! Le vent blagueur de face est toujours là ! Et plus fort que tout à l’heure… Autant vous dire que la montée du barrage se fera moins vite que la première fois.  Je profite du beau paysage le long du lac, c'est la dernière fois...

Je n’oublie l’alimentation. Et désormais, je ne marcherai plus qu’à l’eau des ravitaillements de l’organisation en remplissant mon bidon en route.

Je termine la seconde boucle, soit KM144 en 4h12 environ. Cette fois, j’ai un retard global de 15mn dans la figure sur le temps souhaité qui aurait dû être dans mes cordes !

Alors, j’essaie de maintenir un bon rythme pour ne pas être trop ridicule. La moyenne avec ce foutu vent passe à 33.7km/h. Je suis un peu dépité. 

Sur la dernière petite boucle, il y a une bonne petite bosse à 10%. Je gère la montée en moulinant et décide de donner le max pour les 30 derniers kilomètres restants, orientés moitié vent dans le dos, moitié vent de face… Et c’est dans une partie vent de face, qu’un italien se met dans ma roue et ne se cache pas de drafter, bien abrité. Je le sermonne une fois. Deux fois… mais ça n’a pas l’air de le déranger. Je pose une grosse mine dans la montée du pont de l’autoroute et m’en débarrasse une bonne fois pour toute…. Ah ces italiens ! 

"Ma qué, yété fatigué." "Oui oui, moi aussi !"

Le retour jusqu’à Vitoria sera vent dans le dos. J’accélère pour faire remonter la moyenne à 34km/h. Je la tiendrai jusqu’au bout, les derniers kilomètres de vélo dans Vitoria étant plutôt roulants, même parsemés de quelques dos d’ânes…

Sacha pendant ce temps récupère une gourde sympa.

La transition 2 approche. 

Pour résumer le vélo, je n’aurais pas eu de jus, ni de jambes, et le vent assez fort aura bien puisé dans l’organisme. Le vent c'était pour tout le monde, certes, mais quand on cherche une belle moyenne, c’est à prendre en considération. 

En tout cas, il m’aura bien entamé, c’est sûr, autant physiquement que mentalement.


Transition 2

Le vélo est donné à un bénévole et ça c’est super pratique pour bien enchaîner. Je cours pieds nus sur le tapis qui me mène à la T2

et les jambes ont l’air bien. Je me change assez vite. Je sors de T2 en moins de 3mn. Parfait…. 

C’est parti pour affronter le monstre, le marathon.


CAP – Marathon 4 boucles de 10.5km : mes supporters au top !


Je pars plutôt bien et je suis même surpris que les jambes répondent bien. J’ai ce sentiment agréable d’être presque léger… Est-ce que c’est parce que je me concentre sur de la fréquence, testée à l’entrainement, ou bien est ce que je suis dans un bon jour pédestre ? En tout cas, je me dis que çà s’annonce bien. Enfin.

Les repères kilométriques du début du parcours, mis en place par l’organisation, sont bizarres. Je passe déjà le KM2 alors que je n’en ai pas fait un seul. Peut-être que le panneau est mal placé ? 

Je file sur une allure que je souhaitais tenir : autour de 5mn au kilo. Je passe déjà sur la place d'Espagne où se tiendra l'arrivée... Quand je ressors, je me dis que c’est tout bon. Courir cadence élevée, ça fonctionne. 

Je croise Dimitri qui me dit de courir le marathon en 3h26 pour être SUB10. Piufffff ! Meilleur chrono sur le marathon IM, 3h33, alors 3h26… Mouais. J’ai largement le droit de douter à ce moment-là non, surtout avec les cannes que je n'ai pas eu sur le vélo ? Ou alors, il aurait fallu que j'aille brûler un cierge à Lourdes avant.

Je maintiens le rythme en passant au KM4 en 20mn et quelques secondes.


Mais à partir de ce moment-là, tout commence à nouveau à s’effondrer. 
L’allure fléchit. Je n’ai plus de force. Je n’arrive plus à maintenir la cadence. 
L’allure, ressemble à une marche en courant ou une course en marchant. 
C'est presque pareil. 

Dimitri me pousse, me crie dessus, de ne pas lâcher, que ça va revenir, d’augmenter la cadence, accélérer…

Ooooooh là là là, comme j’aurais tant aimé pouvoir le faire ! 

Mais les jambes ne veulent pas. Yapa les jambes ! Cassées ! Kaput ! 

Les pancartes sur le parcours indiquent KM26 et guère plus loin KM33. C'est bien, mais je ne suis qu’au premier tour. Comme un fada, je regarde les nombres alors qu'il faut valider d'abord les petits numéros de 1 à 9.


Je n’avance pas malgré les encouragements nombreux et énormes de ma petite famille mais aussi du public qui nous pousse véritablement à coup de

« Venga ! » « Animo ! » « Vamos Frédéric ! » « Venga Campion ! »

Le KM8 arrive, la portion la plus pénible, avec ce terrible A/R de la station RedBull qui à chaque fois me semblera interminable. On va et on revient et c'est pénible.

Et quand tu n’as pas les jambes, c’est long, très long.

Point positif à cet endroit, je revois souvent les miens qui m’encouragent et qui me demandent comment ça va. Disons que ça pourrait aller mieux hein !

Finalement, la première boucle est bouclée (c'est bien dit ça) et on longe la ligne d’arrivée. Une ligne d’arrivée située bien sur la droite de la place d'Espagne, que l’on aura le droit d’emprunter seulement après avoir effectué les 4 tours du périple urbain en mode tournicoti tournicoton... 

Oui, comme vous l'avez vu, le parcours zigzague dans tous les sens. A en perdre la tête ou s'emmêler les jambes d'ailleurs.

Allez let's go ! Plus que trois.

Je repars sur l'allure la plus confortable, non pas sur la vitesse, mais pour les jambes qui se contentent du strict minimum nécessaire. C’est fou de ne pas pouvoir y donner un peu de vitesse. Donc, je subis à 10km/h. Je croise en premier Dimitri dans un parc, puis un peu plus loin Adrien et Sacha au niveau du kiosque, 

et enfin Mme BipBip qui filme ma foulée hyper aérienne de rase campagne.

"Allez ! je vais jusqu’au prochain ravito, puis je marche un peu." me dis-je 

Il arrive.

Eau, coca, banane. En fait les bananes me font du bien. J’avais déjà remarqué ça lors de l’IronMan Wales qui date un peu certes, mais cela me convient assez bien. Je promène dans le parc arboré qui suit le ravitaillement. 

"Bon ? Je repars ou je ne repars pas ? On est bien à marcher, c'est plus cool..."

Et à un moment, un signe du destin me remet en selle. Une triathlète de l’Aviron Bayonnais me double. Sandra. Elle est dans son premier tour. Je me dis : 

"Allez, je tape la discute, on est presque voisins, Pau Bayonne, c’est 100 bornes, et je cours à ses côtés." 

Et finalement, le subterfuge fonctionne. On ne va pas très vite, 10, 10.5 km/h, mais on avance. On échange sur la course, le vent à vélo, son premier IronMan… et me voilà en train de passer le KM16 sans m’en apercevoir…. Et comme ça a l’air d’aller mieux, je pars un peu devant jusqu’au prochain ravitaillement et les enfants sont là, juste avant d’y parvenir.

Je les retrouve à nouveau dans les zigzags de fin de parcours, près de la station RedBull et ses deux longues lignes droites. J’ai droit aux encouragements des deux plus jeunes avec leurs T-shirt Otso.

Sandra est repassée devant le temps que je fasse un stop aux toilettes…. 

La fin de la boucle est plus sympa. Elle passe mieux. Les miens sont encore là. Ils sont partout et tout le monde commence à les connaître.  

Et hop, mine de rien ! Le second tour est bouclé. Passage le long de la finish line… Le chrono du vainqueur est affiché, 8h22.

Allez let's go ! Plus que deux.

Je repars comme je peux, surtout que le début de la boucle est dans une petite rue en faux plat montant, et je ne l’aime pas trop. 

KM25. Eh eh ! Encore 15 et c’est bon… et à cette allure, je ne risque pas l’accident cardiaque. D’ailleurs, je n’aurais jamais rencontré le mur du KM28 ou du KM30. Non, je cours et marche aux ravitaillements…. Et même que je marche quelques mètres à côté de mes supporters qui me disent de continuer à courir… et qui initient une ola

Je leur dis alors que je m’arrêterai à la fin du 3ème tour.

Mme BipBip me lance : « Tu rigoles ou quoi, c’est çà ! »

KM30. L'avant dernier terrible A/R de la station RedBull où j’ai droit à une ola de plus de la ‘tite famille. Excellent moment, merci ! 

Je repasse encore une fois ici et ce sera fini !

J’avance péniblement à se demander si on court encore à 6’30’’ au kilo. 

Mais la fin du troisième tour est proche.

C’est là qu’entrent en scène deux coureurs du même club espagnol en trifonction noire rayée de jaune. Ils m’accompagneront sur les trois quarts du dernier tour en chasé croisé. Pas compliqué, les deux compères marchent dès que ça monte, puis se remettent à courir derrière pendant un petit kilomètre environ. Et dans ce jeu de chat et de souris (c’est eux les souris), je finirais par gagner. En fait, ils devaient aussi avoir un tour de retard.

On les voit dans cette vidéo, juste devant, avec leurs tenues noires rayées de jaune.

KM31, je passe de nouveau devant la finish-line. Je regarde en bavant d’envie un concurrent espagnol qui en termine. Le chrono sur l’arche affiche 9h38. Le gars exulte de joie. Tu m’étonnes !

En attendant, j’entame le dernier tour…. Le dernier.

Allez let's go ! Plus qu'un.

J’arrive au KM34. Dimitri est sur le kiosque. Il me dit 

« Oh, on dirait que ça revient l’allure ! ».

Il a raison, je me sens mieux et j’ai accéléré un peu. C’est le bourrin qui sent l’écurie ça… 

Sacha et Adrien me crient sans arrêt « Allez Papa ! » et parfois des athlètes qui couraient à mes côtés me disaient aussi « Allez Papa ! » tellement que la famille BipBip était connue et reconnue sur tout le parcours, allant partout où c’était possible. Ils ont fait des rencontres avec plein d’athlètes au cours du marathon… Joao, Xavier, Christophe, Sandra et plein d’autres encore se souviendront des encouragements des BipBip jusqu'à la fin de leur carrière sportive. Ils avaient plein de copains et copines après la course. On en a croisé quelques uns lorsqu'on a récupéré les sacs de transition.

C’est vers le KM36 que je rattrape Sandra qui est dans son 3ème tour. On s’encourage. Les enfants aussi l’ont beaucoup encouragé. Je fais 100m à ses côtés et lui souhaite une bonne fin de marathon et un bon retour en France. 

Je file. Il ne me reste plus que 5 km à courir. Le public pousse toujours… c’est super sympa. J’arrive sur le terrible A/R station RedBull pour la dernière fois. Yes ! 

Dimitri me dit de continuer comme ça et d’aller chercher un SUB11.

« Tu entends, on ne part d’ici sans le SUB11, tu peux le faire, alors lâche pas ! »

Je vais au bout de la longue ligne droite et juste avant le ravitaillement, j’ingurgite un dernier gel perso et deux verres d’eau, tout en courant cette fois… Il me reste 2km. Champagne !

Comme j’aurais aimé courir le marathon comme ces deux derniers kilomètres. Honnêtement, je me sentais enfin bien. L’appel de l’écurie certes ou l’odeur de la paille fraîche ? Je ne sais pas. Mais je m’y suis senti léger. « Léger » est bien plus raisonnable « qu’aérien », alors pour me faire plaisir, je garderai « léger ».

Je cours, je cours, je vous jure je cours pas mal. Je dépasse des concurrents qui sont dans des tours précédents. C’est forcément plus facile puisqu’ils sont plus lents, à fortiori.

Allez ! C’est aussi la dernière fois devant la statue en bronze IronMan (j’adore), et aussi dans la rue qui longe la place d’Espagne. 

Il y a du monde. Beaucoup de monde. Je tape dans les mains des gosses qui sont derrière les barrières. Petit demi-tour. Je m’engage sur la place d'Espagne. J’y rentre. Cette fois, je ne longerai pas la ligne d’arrivée pour repartir sur un autre tour. 

Non, cette fois, j’ai fini ! Cette fois, je peux m’engager sur le finish line.

Mon chrono s’affiche 30 mètres environ avant de la franchir. 10h48. Intelligent. 

Je comprends alors que c’est écrit dans le marbre. Alors je profite "trop peu" de ces 30 derniers mètres. Je cours, certes, mais je remercie le public et espère voir les miens là, au bord. Mais, je réalise que ce sont des places VIP. Alors je ne les verrai pas là. Dommage.

Le speaker annonce 

" You are an IronMan !"

Oui ! Et pour la 10ème fois. La 10ème médaille IronMan autour du cou.

En vidéo...


Je ne trainerais pas longtemps dans l’aire d’arrivée, où le ravitaillement d’après course est absolument lamentable. Une petite salade de fruits au sirop en boite. Rien de plus. Nullissime. Aux Sables d’Olonne, on avait eu droit à des pizzas, des pates avec de la viande, des desserts, des boissons… 

Je retrouve alors vite les miens après avoir récupéré le T-shirt. Et je sors.

Et là je dis : « Y a t-il quelqu’un qui veut me payer une glace ? »

Nous voilà donc partis manger une glace après avoir récupéré les sacs de transition et le vélo. Et la nuit qui suivit fut bonne, je vous l’assure.

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Alors que dire de ce 10ème IronMan ?

Je suis content d’être arrivé au bout. 

Content, mais un peu déçu. Et pourtant, je ne devrais pas l’être. Car j’ai fait au mieux avec la forme du moment et honnêtement je n’ai jamais eu vraiment de jus sur toute la course pour me battre en vue d’une performance chronométrique. J’ai nagé comme un caillou, roulé sans forces, en les laissant en grande partie sur le vélo à cause d'un vent inattendu, et j’ai couru à une petite allure, sans pouvoir faire mieux. C’est le sport.

"Quels que soient le résultat et le niveau de forme, un IronMan reste un IronMan, un défi de dingue ! " citation d'un dresseur de Crocos

Les deux grandes satisfactions viennent de l’état dans lequel je termine. 

  • Aucune blessure. La machine est intacte. Une course à prendre comme la fin d’un enchainement de pépins physiques qui m’auront bien pourri la vie pendant toute la préparation.
  • Le mental. Il n’a jamais cédé devant l’adversité, les blessures, les contre-temps et le jour de la course. Je garderai ça comme force numéro une !

A moi désormais de garder la forme pour ne pas retomber dans le même piège. C’est tellement mieux quand on peut se préparer sereinement.

Je termine par cette photo géniale avec la statue de bronze IRONMAN. Je veux la même dans le jardin.

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Enfin...

Merci à tous ceux qui me suivent de près comme de loin, qui me supportent avec toutes leurs tendresses et leurs amitiés. Un grand merci aux trois différents kinés qui ont réussi à me remettre sur pied et à Christophe pour le bike.

Et surtout, un ENORME merci à ma petite famille. Pour tous vos encouragements, votre patience, votre ferveur lors de ces courses si particulières et aussi et surtout pour me supporter, dans tous les sens du terme, au quotidien, tout le long de l'année.

You are finally all IronMan too !


Et pour ceux qui aiment les vidéos, le montage de Mme BipBip. 6 minutes de souvenirs avec MA Team




1 commentaire :

  1. "Donner le meilleur de soi, ne rien regretter, prendre du plaisir, et briller sous les feux de la Finish Line, le tout sous les regards et les encouragements de ses proches... telle [fut ta] digne récompense à l'IronMan de [Vitoria]". 😇

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